Il y a un peu plus de deux mois, j’ai essayé d’être client chez Tilgreen. Ma vieille 125 thermique commençant à… se faire vieille, j’ai voulu passer dans la modernité et essayer de passer à la moto électrique. Avec un relativement petit budget, il n’y a pas encore beaucoup de choix et le mien s’est porté sur la Horwin CR6 Pro, dont Tilgreen est l’importateur officiel et l’une des seules motos électriques dotées d’une boite de vitesses (ce dont j’avais envie). Mais avant d’en arriver à mon avis définitif sur Tilgreen (spoiler alert : j’en suis très mécontent), laissez-moi vous raconter l’histoire de l’achat, et de la revente, de cette belle moto.
C’est le 18 octobre que je l’ai commandée et payée, une date à laquelle j’étais encore loin de me douter de l’énergie que cet achat allait me coûter.
Dans un premier temps, Tilgreen ne retrouvait plus le certificat de conformité nécessaire à faire immatriculer la moto, « suite à leur déménagement ». Puis ils l’ont retrouvé : le 9 novembre ; déjà trois semaines après que j’aie sorti 4200€. Bon, admettons. Cela arrive, le commercial était franchement désolé à chaque fois au téléphone, et je suis pas spécialement un emmerdeur. J’ai gentiment attendu.
Puis, j’ai attendu la livraison de la moto (eh oui, car Tilgreen est à Nantes, et moi à Toulouse). Je l’ai attendu environ 10 jours, mais c’était « les délais du transporteur », m’a t’on dit. Admettons. Je suppose que ce n’est pas une logistique aussi rodée que celle de Chronopost quand il faut transporter une machine de deux mètres de long et de 140kg.
Je l’ai reçue aux environs du 19 novembre, évidemment, au beau milieu d’une semaine où j’avais plein d’autres choses à faire que de l’essayer, à part sur 10 kilomètres. Un mois donc entre le paiement et la réception.
Le 26 novembre, je suis allé au travail avec, histoire de l’essayer un peu plus, et de la montrer à mes collègues motards qui étaient très curieux de la voir ! Et c’est là, en fumant une clope en bas du bureau, que j’ai remarqué le numéro de série gravé sur le cadre : « tiens », me suis-je dit, « il ne me semble pas qu’il y avait de K dans le numéro de série que j’ai recopié pour l’assurance ! » Car oui, j’ai une assez bonne mémoire visuelle.
Après vérification sur la carte grise, effectivement, le numéro de série de la moto finit par 80K1000005 ; tandis que celui de la carte grise finit par 65L10000288. Cela fait beaucoup de chiffres différents.
J’ai prévenu Tilgreen de ce souci, et c’est là que le compteur de temps et d’énergie s’est remis à tourner. Ils m’ont dit, très aimablement, qu’ils s’occupaient du problème. Puis le 3 décembre, une bonne semaine après, que la carte grise était en train d’être refaite en préfecture. Puis le 11 décembre, une deuxième semaine après, surpris de ne rien voir venir (les immatriculations, ça va très vite maintenant), j’ai téléphoné moi-même à l’ANTS pour m’enquérir de la situation. Quelle ne fut pas ma surprise d’entendre « nous n’avons aucune demande en cours pour cette moto » !
Bref, j’ai commencé à me dire qu’on me prenait pour un sandwich, et j’ai envoyé une lettre recommandée à Tilgreen pour demander une résolution rapide ou un remboursement de la moto ; lettre que j’ai aussi envoyée sous forme d’email, par courtoisie, et qui m’a permis d’avoir une réponse rapide et rassurante : D’après Tilgreen, c’est le constructeur qui se serait gourré sur le numéro de réception ou le CNIT, (ça n’a jamais été très clair, j’ai demandé le certificat de conformité, j’ai demandé le CNIT, on ne m’a jamais montré aucun document), et « bien sûr si le problème persistait nous rependrions le véhicule. »
Comme vous pouvez l’imaginer, ma patience commençait à s’user, et après avoir discuté avec des amis motards au courant des procédures d’importation de véhicules peu courants, le problème m’a semblé beaucoup trop bureaucratique et compliqué pour pouvoir envisager d’utiliser ma moto avant 2022.
J’ai donc demandé un remboursement le 15 décembre. Parallèlement, j’ai ouvert un dossier chez mon assistance juridique (prenez tous et toutes une assistance juridique si vous avez 10€/mois en rabe, c’est rarement utile mais extrêmement utile quand ça l’est). Juste au cas où.
On m’a promis que le virement serait fait le matin du vendredi 17 (pourquoi pas le 15 ? « en déplacement »). C’est toujours difficile pour moi dans ce genre de situation de savoir où mettre la barre, accepter quelques compromis pour éviter de brûler des ponts et espérer revoir mes quatre mille balles sans devoir attendre la justice ? Ou décider que trop c’est trop, faire une croix sur l’amiable et sortir la grosse artillerie ?
Le 17 à midi, pas de nouvelles, je suis allé les chercher au forceps en téléphonant environ huit fois et en laissant un message extrêmement agacé, … et j’ai reçu le pdf avec l’avis de virement à 13 heures. Deux choses m’ont surprises dans ce pdf, le fait qu’ils aient demandé que le virement soit demandé le samedi 18 et non pas le 17, ainsi que sa date d’impression, le 17 à 9h37. Pourquoi ne pas me l’avoir transmis directement après l’avoir imprimé ? Cela m’aurait évité de m’énerver tout seul dans mon coin.
Lundi 20 : pas de sous sur mon compte (compréhensible avec les délais de deux-trois jours ouvrés des banques)
Mardi 21 : pas de sous sur mon compte (encore un peu compréhensible, si pas de chance, mais c’est rare quand même). Je demande des nouvelles : Ça sera arrivé demain !
Mercredi 22, matin : pas de sous sur mon compte. Je commence à fumer des naseaux.
Mercredi 22, après-midi : pas de sous sur mon compte. Je reçois un SMS d’excuse, « la banque m’a confirmé que vous l’aurez demain matin ».
Jeudi 23, matin : vous avez deviné ? pas de sous sur mon compte. Je souffle, j’aime vraiment pas être pris pour un con. J’envoie deux SMS :
- 07:08 – « Eh bien, pas d’argent sur mon compte. Je suis en vacances ce soir, j’aurai le temps d’aller porter plainte demain. »
- 10:03 – « Si vous préférez la solution amiable, vous pouvez aller demander à votre banque un virement immédiat (10s) ».
Il faut dire qu’apparemment, vendre un véhicule dont la « réception » n’a pas été faite, pour un professionnel, c’est potentiellement deux ans de prison et 30000€ d’amende. Mon interlocutrice à l’assistance juridique m’a gentiment proposé de téléphoner au directeur de Tilgreen, ce que j’ai accepté avec plaisir : je n’avais absolument plus envie d’être pris pour un jambon, et j’étais complètement prêt à aller porter plainte et voir lequel, du président de Tilgreen ou de moi, cela ennuierait le plus.
Et à 10:43, je reçois le virement (pas celui de la semaine d’avant, un autre, un virement immédiat). C’est là la magie de l’assistance juridique.
Et le soir du 23 décembre, enfin, la cession de la moto est faite, deux mois et six jours après l’avoir payée. Rendez-vous fut pris avec le transporteur et la moto est retournée à Nantes. Il va sans dire qu’au départ de la moto, j’ai filmé chaque étape du départ de la moto, de la mise en carton du chargeur et des rétros, au sanglage du carton sur la selle et enfin à l’enlèvement de la moto. C’est incroyable à quel point, une fois la confiance disparue, je peux devenir paranoïaque.
Bref. Mon avis de client Tilgreen ? Fuyez. Je n’ai, sans nul doute, pas eu de chance d’acheter une moto dont la réception a été faite de travers par le constructeur. Mais la façon dont Tilgreen, vendeur mais aussi importateur officiel, a géré ce problème, m’a vraiment déçu. Je n’ai aucune idée de pourquoi les choses ont traîné à ce point, alors que j’avais clairement communiqué mon mécontentement et que j’ai fait preuve de compréhension.
Au final, je n’ai toujours pas compris comment un professionnel peut vendre un véhicule dont la carte grise possède un mauvais numéro de série ainsi qu’un mauvais type. Je n’ai toujours pas compris ce qu’ils ont essayé de faire pour résoudre ce problème. Je n’ai toujours pas compris comment ce premier virement dont j’ai pourtant reçu un pdf de confirmation n’est jamais arrivé sur mon compte. Et je n’ai toujours pas compris pourquoi avoir fait trainer ce remboursement plus d’une semaine alors qu’une demi-heure suffisait à résoudre la situation.
Bref, au moins j’ai récupéré mes fonds, et du coup, je suis allé acheter une Honda. Je suis rentré dans la concession, j’ai dit « je voudrais cette moto », j’ai fait un virement, j’ai signé un papier, j’ai fumé une clope, j’ai récupéré le certificat d’immatriculation provisoire, et je suis reparti avec.