Récemment une amie se demandait quelles alternatives on pourrait trouver à la voiture à moteur thermique pour consommer et polluer moins, et pourquoi les voitures électriques étaient si cher, et pourquoi il n’y avait pas d’alternative crédible.
Et bien je pense que les alternatives à la voiture à moteur thermique, ce n’est pas une voiture avec un moteur à énergie différente. En effet, l’une des seules matières premières qui puisse fournir autant d’énergie que le pétrole, c’est l’uranium.
Il existe des voitures hybrides comme la Prius (qui consomme toujours 5l/100), des voitures purement électriques qui se traînent sur quelques dizaines de kilomètres (de 60 à 300, 160 en moyenne d’après les différents articles sur voitureelectrique.net juste pour pouvoir faire des pointes à 130), des prototypes à hydrogène, et d’autres trucs farfelus, comme la voiture à air comprimé (MDI par exemple, qui restent très évasifs quant à l’énergie nécessaire à compresser l’air) ou encore le moteur Pantone (qui réduirait la consommation de 30% et la pollution de 70%. Paraît-il. Je dubite. Même si ça marchait, je crois savoir que l’eau n’est pas une ressource renouvelable ou inépuisable).
Tous ces systèmes essayent de moins dépendre du pétrole pour se procurer l’énergie nécessaire au déplacement, mais c’est difficile. Il faut donc diminuer l’énergie nécessaire au déplacement.
La réduction de la masse
Le problème, c’est que ces véhicules pèsent toujours plusieurs centaines de kilos, et roulent toujours à (au moins) une centaine de kilomètres à l’heure. Il faut beaucoup d’énergie pour atteindre ce résultat. Un relativement petit moteur, actuellement, fait 90 chevaux. On trouve des moteurs de 150 ch sur des voitures qui n’ont même pas pour vocation d’être sportive, et des monstres de 2-3 tonnes et 300ch. Pour rappel, un être humain moyennement entraîné a une puissance de 0,20ch…
C’est à dire que quand on prend sa voiture pour se transporter, seul et sans bagages, d’un point A a un point B on utilise un moyen de transport 450 fois plus puissant que nécessaire. Nécessairement, ça consomme beaucoup plus d’énergie que nécessaire. (Je rappelle qu’un trajet sur deux effectué en voiture fait moins de trois kilomètres, et le taux moyen d’occupation d’une voiture est de 1,3 personne).
Pour éviter cela on peut utiliser des moyens de transports différents : la marche, le vélo, les transports en commun (dont le ratio poids total/charge utile est meilleur), et toute une gamme de véhicules à pédales (assistés électriquement ou non) existe déjà, avec lesquels on peut, outre se transporter, transporter des enfants (on peut transporter trois enfants avec un siège enfant et une remorque), transporter des courses (remorque), faire de relativement longues distances (vélo couché, vélomobile – un truc tout bizarre mais s’il était majoritaire en ville… il serait super pratique). Certes, cela demande des efforts physiques, et pour beaucoup, c’est actuellement impensable car c’est dangereux à cause des voitures (c’est en partie faux : ce n’est pas très dangereux, beaucoup moins qu’un deux-roues motorisé, comme le montre ce document de la FUBicy ou celui-ci de la Sécurité Routière. C’est vrai, par contre, que la dangerosité provient des automobiles et poids lourds), ou bien encore parce que ça fait suer (au sens propre) et qu’il faut se changer de tshirt.
Développer les transports en commun, c’est possible (il faudra aussi les rendre attractifs), et rendre le vélo attractif, ça devrait être faisable avec les infrastructures adaptées. Ailleurs, ça marche déjà pas mal :
Enfin, plus la proportion de modes de transports doux est grande, moins ces modes de transports sont dangereux, car ils sont plus pris en compte et respectés.
La réduction de la distance
Pour dépenser moins d’énergie en transport, on peut aussi… moins se transporter. Cela paraît évident mais nous ne sommes pas prêts, psychologiquement, à l’accepter. La plupart d’entre nous qui sommes en appartement espère pouvoir habiter dans une jolie maison avec un jardin, et tant pis si elle est en périphérie, mal desservie par le réseau de transport en commun. Ça, c’est l’une des choses qui rend quasiment indispensable la voiture, et même souvent deux voitures. J’aimerai beaucoup que mon fils puisse jouer dans le jardin quand il le veut… Mais peut-être pas à ce prix…
Mon père architecte me disait que ça fait déjà quelques années que les villes commencent à se regrouper et se re-verticaliser. Il n’est bien sûr plus question de faire des tours comme dans les années 70/80, mais le fait est que le pavillon individuel commence à perdre du terrain sur les petites collectivités. Habiter moins loin de son lieu de travail, faire ses courses près de son domicile (c’est plus cher et le rapport actuel de prix essence/nourriture me pousse à aller les faire en voiture, une fois par mois, chez Leader Price, plutôt que plus souvent au petit Casino d’à côté) sont des alternatives crédibles à la voiture.
La réduction de la vitesse
Plus la vitesse est grande, plus l’énergie nécessaire au déplacement est grande, et le rapport est loin d’être linéaire. Je le sens à vélo, l’effort entre 15 et 20 km/h est peu différent, entre 20 et 25 km/h on commence à le sentir, et entre 25 et 30 km/h, c’est dur et je lutte. C’est normal : avec l’aérodynamisme pourri d’un vélo droit, il faut faire deux fois plus d’effort pour avancer 1,3 fois plus vite.
C’est pareil en voiture : pour aller plus vite, il faut consommer plus. Une Golf diesel de 90ch qui consomme 6l/100 sur l’autoroute à 130, consomme 3,7l/100 sur la même autoroute à 90. Par exemple, avec notre voiture et sur le trajet Toulouse-Tosse, qu’on fait assez souvent, on pourrait faire ça et consommer 15 litres au lieu de 21, mais on perdrait 50 minutes.
Mais c’est pas crédible tout ça, c’est chiant !
Parmi les gens que je connais, toutefois, l’écrasante majorité ne peut pas faire autrement que d’aller travailler en voiture, par exemple. Même les citadins. En réalité et en l’état actuel des infrastructures, la plupart de mes amis citadins pourraient faire une combinaison de : bus, métro, pieds, vélo, train. Ça leur prendrait un peu plus de temps (avec les bouchons, ce n’est pas sûr). Ça leur coûterait certainement moins cher. Mais ce serait un peu moins pratique, car la voiture, elle est en bas de chez nous, et elle nous amène pile au boulot, pas besoin d’attendre qu’elle passe, elle ne fait pas grève, et on peut emmener nos enfants chez la nourrice avec. C’est cette somme d’avantages indéniables de praticité qui fait que ce n’est pas possible de ne pas prendre la voiture. Avec un litre d’essence à 4 euros, soudainement, ces avantages deviendront proportionnellement négligeables et ce sera plus facile de faire autrement…
Clo, par exemple, prend la voiture pour aller travailler, ça lui permet de poser Paul chez la nourrice et d’arriver au travail en trente minutes. En transport en commun, il lui faudrait aller chez la nourrice avec Paul en poussette (12 minutes), poser Paul, aller prendre un métro à la station la plus proche (5 minutes de marche/attente + 20 de métro), puis un bus (15 minutes de marche/attente puis 15 de bus). Une heure dix de transport.
Alternativement, elle pourrait faire huit kilomètres à vélo sur un trajet moyennement adapté (en plein centre ville, il y a peu de pistes cyclables, ou bien sur de grandes artères sur ce trajet). C’est beaucoup plus contraignant, car il faut s’habiller en fonction du temps, se faire pleuvoir dessus, prendre du change quand il fait chaud, et supporter des dizaines d’automobilistes au mieux inattentifs, au pire discourtois. Le vélo sera une alternative crédible quand l’essence sera plus chère. Ou que nous aurons déménagé à un endroit plus adapté à nos lieux de travail.
Pour moi, c’est déjà fait, et c’est facile : j’habite à 500 mètres de la gare où passe un train qui m’emmène directement, sans changement, en 20 minutes à une autre gare située à 600 mètres de mon lieu de travail, pour 35 euros par mois. Considéré comme cela, c’est difficile de trouver un seul avantage à la voiture ! C’est une chance, en un sens, mais aussi, lorsque nous avons emménagé où nous habitons, cette gare (et le métro juste à côté) ont pesé pour beaucoup dans notre choix.
Et le reste ?
Pour consommer moins d’électricité, c’est à peu près pareil : la seule alternative, c’est de changer nos habitudes. Je n’ai pas vraiment besoin de mon serveur dans mon placard. Il pourrait être hébergé en mutualisé. Mais c’est tellement plus pratique que ça me pousse à consommer 100W 24h/24. Pour l’instant…
Pour le chauffage, c’est la même chose : l’amélioration des isolations des logements neufs auraient dû faire baisser les factures de chauffage ces dernières décennies. Or, elles sont restées stables, car les surfaces chauffées ont augmenté. Les constructions neuves, souvent bien isolées, parfois HQE (Haute qualité environnementales), parfois carrément « passives« , sont plus écologiques et économiques dans leur consommation d’énergie que les vieux immeubles en parpaing et simple vitrage. Elles sont aussi plus grandes, plus excentrées, et souvent mieux chauffées, ce qui augmente le coût du chauffage.
Il y a plein d’autres choses que l’on peut changer pour consommer moins d’énergie, et c’est ce que la taxe carbone est censée nous faire réaliser : en nous montrant le vrai prix – à long terme – de notre mode de vie. Et ce qu’on est censé réaliser, c’est que nos habitudes devront changer.
Le commercial du bureau d’à côté dans mon bâtiment, au boulot, avec son Porsche Cayenne (16l/100km, 380g de CO2/km) et sa manie de prendre l’ascenseur pour monter au premier étage (mais pas pour en descendre, ouf, tout n’est pas perdu), peut-être qu’il ne s’en est pas encore rendu compte. Il est caricatural, mais il est loin d’être le seul…
Et surtout, il ne faut pas croire que le problème est transitoire. Ça arrivera vraiment, il y aura pénurie, il y a aura plus de guerres du pétrole, l’énergie coûtera la peau des fesses, et on se limitera parce qu’on aura plus le choix. Paul ne partira peut-être jamais en vacances en avion de l’autre côté de la terre.
C’est vrai que ça fait réfléchir…